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samedi 24 décembre 2011

Promise d'Ally Condie

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CONDIE Ally, Promise, Gallimard Jeunesse, 2011


    Jamais un livre de science-fiction n'a été aussi vrai. L'action se déroulant dans un monde semblable au nôtre nous fait penser à une projection dans le futur. Les combats que nous menons aujourd'hui dans le but d'améliorer notre quotidien y sont exagérés, nous emmenant à remettre en question notre façon de penser et de vivre. Le livre entier nous incite à ouvrir les yeux sur notre société qui accorde beaucoup trop d'importance à la perfection.
Si sur le plan message et idéologie ce livre est époustouflant, par la force de l'écriture de son auteure, Ally Condie ; par contre, l'histoire d'amour est décevante. La psychologie amoureuse est réduite à sa plus simple expression, les personnages et le lecteur avancent en aveugles dans un monde qui leur semble inconnu, les émotions produites sur le lecteur sont quasi inexistantes... Considérons plutôt l'histoire d'amour comme un récit parallèle mineur à l'intrigue principale.
Ce livre est donc à lire pour l'interpellante decription que nous peint ce roman.



       Attardons-nous un instant sur l'illustration de la première de couverture. Généralement, cet élément, dont le contenu du livre est totalement indépendant, est présent dans un but purement commercial : une bonne couverture est une couverture attractive, qui attire le regard du futur lecteur, le poussant à acheter ; elle nécessite donc une image soit jolie, soit intrigante, soit même choquante. Cependant, celle-ci mérite que nous nous y arrêtions un instant pour réfléchir car elle est particulièrement représentative de l'oeuvre littéraire. Elle ne comporte pas de détail superflu ou non mentionné à l'intérieur du récit ; mais elle est un outil supplémentaire pour mieux comprendre le sens de l'histoire. L'analyse picturale permet, par le dégagement et la supposition des symboliques représentées, une compréhension plus précise, plus approfondie du roman.



    L'image représente une bulle dans laquelle est enfermée une jeune fille ,vêtue d'une robe de bal verte, qui essaie désespérément, supposons-nous par la position de ses bras étant donné que son visage est caché par sa chevelure, de s'en échapper.
L'identité de la jeune fille ne laisse aucun doute possible : il s'agit de Cassia, l'héroïne du roman. La couleur verte nous le confirme : Cassia aime le vert, la couleur de ses yeux, et la robe qu'elle porte au début du livre lors de la cérémonie de couplage est elle aussi verte.

Nous supposons d'ailleurs qu'elle est habillée de cette robe-là. Par contre nous ne pouvons que nous demander pourquoi avoir choisi cette robe. En effet, cette robe n'est pas représentative de la vie quotidienne de la jeune héroïne. C'est une robe exceptionnelle qui ne lui appartient pas ; elle lui a juste été prêtée pour un soir.
Cette dernière phrase renferme la première hypothèse possible : il n'y a aucun réel bonheur dans cette société et même s'il existe, il n'est que temporaire. Il ne nous appartient pas si bien que dès qu'il devient superflu, il doit être rendu. Dans ce cas-ci, la robe représente donc un bonheur éphémère dont nous ne sommes pas maîtres. C'est par conséquent la dénonciation d'un système totalitaire qui contrôle tout et qui ne laisse aucune liberté.
La liberté est une valeur défendue par de nombreuses personnes dans notre monde, auxquelles il faut ajouter Cassia. Cependant, la rêver et la crier ne permettent pas de l'acquérir. Pour être libre, il faut se battre et tout le monde n'en est pas capable car cela demande beaucoup de volonté, de force morale, de travail et de sacrifices, mais surtout de croyance et de confiance en soi. Tout aussi déterminée qu'elle soit, Cassia a besoin de quelque chose pour la soutenir et/ou la propulser en avant. C'est donc la deuxième hypothèse possible : la robe est une arme pour faire tomber les barrières dressées par la société. La robe symbolise la force non négligeable des sentiments : un bout de tissu paraît inoffensif mais associé à des émotions et à des souvenirs, il devient redoutable.
La cérémonie de couplage est dans un sens redoutée en plus d'être attendue pour tous les jeunes gens. Celle-ci est un facteur de stress car c'est au cours de celle-ci que chacun saura avec qui il sera couplé et donc passera le restant de sa vie. Pour Cassia, cette cérémonie a bouleversé irréversiblement sa vie : lors de celle-ci, elle apprend être promise à son meilleur ami, à la suite de celle-ci, elle apprend à aimer Ky, un copain d'enfance ; à cause de nouveau de celle-ci elle commence à se poser des questions. Tout cela nous emmène à la troisième hypothèse, la plus simple de toutes : la robe est l'élément déclencheur de l'histoire. La robe qui désigne la cérémonie, laquelle se rapporte aux officiels, les dirigeants de la société dans laquelle vit Cassia, symbolise une faille du système, une brèche que nous pouvons agrandir pour faire éclater la vérité au grand jour.
Ces trois hypothèses sont toutes plausibles et envisageables. La signification de ladite robe tient probablement d'un peu des trois. Nous ne pouvons hélas être certains qu'il s'agisse bien de ce à quoi l'illustrateur a pensé lors de la réalisation de cette couverture. Notre seule certitude : l'image est un langage complexe qui laisse place à toutes les interprétations possibles dont aucune ne peut être totalement fausse.

Passons à présent à la bulle qui entoure la jeune fille. Son sens est beaucoup moins ambigu que la robe. Nous pouvons donc affirmer qu'elle représente une prison ; prison créée par la société. En effet, personne n'est vraiment libre ; chacun est constamment surveillé et contrôlé par d'autres personnes. Pourtant la bulle est plus fragile qu'elle ne paraît. Pour la garder intact, il faut cultiver le mythe et la légende. Dès qu'une personne cesse d'y croire, elle devient une menace pour l'équilibre de la société entière.
D'une certaine manière, la bulle ne représente pas uniquement une prison. Elle protège également. Le monde dans lequel vit la jeune héroïne est un monde qui se veut parfait. Rien n'y est laissé au hasard, de la composition d'un repas à la durée de vie d'un habitant. Tout est contrôlé par des ordinateurs, eux-mêmes surveillés par des Officiels. La probabilité qu'une erreur se produise est nulle. Contrairement à nous, qui sommes fascinés par le futur et les nouvelles technologies, Cassia, elle, s'émerveille devant les vestiges du passé. Les dirigeants craignent le passé car de ce temps l'homme dépendait de la nature et du temps qui passait. Tout se qui est susceptible de rappeler ces temps anciens doit est considéré comme une menace et être surveillé de près. ( cf. les reliques ) En effet, le passé est dangereux puisque les gens mouraient beaucoup plus jeunes, attrapaient toutes sortes de maladies, etc... C'est pour protéger la société entière qu'il faut contrôler la vie des gens, afin de leur assurer une meilleure qualité de vie.
Nous sommes donc face à un problème qui touche toutes les sociétés totalitaires : elles ont un idéal qu'elles cherchent à appliquer mais les moyens mis en oeuvres sont souvent problématiques et peu respectueux de l'individu-même.


    Vous l'aurez compris, j'ai énormément apprécié ce roman pour tout ce qu'il veut dénoncer. Je l'ai trouvé particulièrement intéressant à analyser et il est pour moi, une base pour réfléchir sur nous, notre organisation, nos relations avec les autres. Sans être ennuyeux, il convient à tous les lecteurs, y compris ceux qui veulent juste passer un bon moment sans se prendre la tête. Avant tout, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre et cela devient une seconde nature chez moi de décortiquer tout ce que je lis. Je me suis aussi liée aux personnages, en particulier le grand-père de Cassia, que je considère comme un vieux sage à cause de son âge, de sa position dans l'arbre généalogique, et de sa façon de s'exprimer par énigmes. Il y a toujours quelque chose à relever quand nous lisons un livre mais celui-ci m'a beaucoup touché de par les sujets qu'il traite. C'est une lecture qui me marquera encore quelques années.


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